D'imposantes constructions en pierre marquent les rives du lac à Zurich : les immeubles d'habitation Rotes Schloss et Weisses Schloss sur le Quai General-Guisan ou les sièges sociaux des compagnies d'assurance Swiss Life, Zurich et Swiss Re sur le Mythenquai.
"Notre immeuble ne devait pas être un tel élément minéral de la ville, mais un solitaire dans la verdure", explique l'architecte Mike Guyer à propos de la nouvelle construction de l'immeuble de bureaux que lui et Annette Gigon ont planifiée dans le parc de la villa historique Rosau. C'est pourquoi le bâtiment se tient à distance des rues adjacentes, contre lesquelles le terrain est délimité par une clôture restaurée et partiellement complétée à grands frais. De plus, le nouveau bâtiment est un à deux étages plus bas que ses grands voisins et il est habillé d'un matériau particulier : le bronze de construction.
Le matériau de la façade a été choisi dès les premières phases du projet, se souvient Mike Guyer. Avec sa surface sombre, pas tout à fait homogène, le bronze de construction s'intègre mieux dans l'espace vert et semble plus souple que l'aluminium anodisé brun, par exemple. La patine visible donne de la valeur au matériau et confère au bâtiment une représentativité et une aura discrètes qui conviennent au lieu. Il n'a cependant pas été évident pendant longtemps de réaliser la façade comme prévu : le matériau est relativement cher et sa disponibilité est limitée.
Un matériau de tradition
La façade est un entrelacs de profilés verticaux extrudés et de tôles horizontales laminées à froid. Pour l'instant, les profilés sont encore nettement plus foncés que les tôles, mais avec le temps, la couleur s'harmonisera. La surface ne sera toutefois pas totalement homogène. "Nous avons d'abord dû nous y habituer. Mais cela fait partie des propriétés du matériau", résume Mike Guyer. Avec son matériau aux reflets brun-or dans son nouvel état, l'immeuble de bureaux rejoint une série de bâtiments éminents qui tirent leur force du même matériau. À Zurich, il s'agit par exemple du bâtiment Modissa sur la Bahnhofstrasse, construit par l'architecte Werner Gantenbein en 1975, et à New York du Seagram Building de Ludwig Mies van der Rohe et Philip Johnson en 1958. Le bronze a connu son premier âge d'or à partir de la fin des années 1930, lorsque ce matériau non corrosif et résistant a été utilisé principalement pour les profilés de fenêtres et de portes. Ainsi, les longues fenêtres en bande, les vitrines et les auvents de l'extension du grand magasin Jelmoli de 1938 sont fabriqués en bronze de construction. Mais aussi connu que soit le terme 'bronze de construction', il est en fait faux ou du moins imprécis : en tant qu'alliage de cuivre, de zinc et de manganèse (et éventuellement de plomb ou de fer), le matériau appartient à la variété 'laiton spécial'. Le terme correct de 'bronze' ne s'applique en fait qu'aux alliages de cuivre et d'étain.
Un accès noble
L'étroite parenté entre le bronze de construction et le laiton se manifeste à l'intérieur du nouvel immeuble de bureaux, plus précisément dans les trois niveaux d'accès éclairés par le haut, avec les escaliers et les ascenseurs. Des surfaces lisses en béton apparent et un sol en béton poncé forment une coque à la fois noble et dure. Les travaux métalliques à l'aspect doux contrastent avec cela : le garde-corps à lattes en laiton doré brillant et les façades et cabines d'ascenseur également en laiton. Contrairement à la balustrade, les ascenseurs, tout comme les autres portes métalliques, sont fabriqués en laiton bruni, dont la couleur se situe entre le bronze de construction qui se colore en brun sur la façade et la balustrade brillante. Les pièces métalliques sont fabriquées avec la plus grande précision dans l'atelier et montées sur le gros œuvre. Afin d'absorber les différentes tolérances dimensionnelles entre le béton coulé sur place, moins précis, et les façades d'ascenseur, fabriquées avec précision, des joints d'ombre marqués séparent les éléments de construction et soulignent la différence entre le gros œuvre et le second œuvre.
Cette gradation - bronze de construction, laiton bruni, laiton brillant - reflète la proximité des utilisateurs avec le bâtiment : on regarde plutôt la façade de loin, on s'approche des ascenseurs raffinés et on les touche ponctuellement, tandis que le garde-corps doit flatter la main. Peu importe que l'on se déplace dans le bâtiment en empruntant les escaliers ou que l'on prenne l'ascenseur : La continuité de la matérialisation de haute qualité est maintenue. Celui qui entre dans l'ascenseur quitte certes la cage d'escalier généreuse, mais la petite cabine d'ascenseur est conçue avec autant de soin que l'ensemble du bâtiment. Dans les étages de bureaux, cette qualité supérieure se poursuit, même si les matériaux sont différents. Le sol est recouvert de moquette, des panneaux métalliques finement perforés forment le plafond, auxquels s'ajoutent des éléments en bois. Sur la façade, le cercle se referme sur le laiton : vers l'intérieur, la construction de fenêtres en aluminium montre son visage anodisé brun, mais à l'extérieur, les profilés sont recouverts de bronze de construction. Le point culminant de l'application est le passage ouvert de la rue à la villa en passant sous l'immeuble de bureaux. Ici, le laiton stabilisé par un revêtement transparent brille de mille feux et confère à l'espace une atmosphère festive.
En point de mire du public
Depuis les fenêtres des bureaux et les terrasses sur le toit, on jouit d'une vue magnifique : sur la Villa Rosau, sur le lac ou sur le Palais des Congrès. Au printemps 2008, tous les regards de Zurich se sont tournés vers la Villa Rosau et ses alentours. Il était prévu de remplacer le Palais des Congrès par un nouveau bâtiment et de le compléter par un hôtel sur le site de la 'Rosau'. Pour ce faire, la ville souhaitait acquérir le terrain situé à côté de la villa, utilisé par l'hôtel Baur au Lac voisin comme terrain de tennis et parking. La votation populaire sur le crédit pour l'achat du terrain était un plébiscite sur la construction du nouveau Palais des Congrès. Et c'est ainsi que le non au crédit, le 1er juin 2008, a également mis fin aux planifications du nouveau centre de congrès. Actuellement, la fondation du Palais des Congrès fait rénover son bâtiment classé monument historique par Haefeli Moser Steiger et la Tonhalle qui y est intégrée. Le terrain sur lequel était prévu l'hôtel des congrès est resté entre les mains des propriétaires initiaux, qui y ont construit le bâtiment administratif désormais achevé. La Villa Rosau, une œuvre de Ferdinand Stadler datant de 1845, sera rénovée à grands frais et aménagée pour le Club Baur au Lac.
Immeuble commercial Rosau, 2016-2020
Claridenstrasse 4-14, Glärnischstrasse 6 / 8, Zurich
Maître d'ouvrage : Villa Rosau AG, Zurich
Architecture : Gigon / Guyer Architekten, Zurich
Architecture paysagère : Vogt Landschaftsarchitekten, Zurich
Direction des travaux : b+p baurealisation, Zurich